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Fonctionnement opaque, activités peu claires, perfusion d’argent public… Nombreuses associations (même si cela reste une minorité) s’éloignent de l’idéal que tout un chacun y voit, à savoir un regroupement de personnes agissant, généralement dans un domaine particulier (sport, culture, éducation…), pour l’intérêt général. Du scandale tristement célèbre des « Chevaliers Blancs » du Darfour à celui moins connu mais tout aussi dramatique des comptes troubles de l’aide aux lépreux, le monde associatif n’est pas exempt de tout reproche. 

 

« Comment trouver 42 milliards d’euros rien qu’en traversant la rue ? » 

 

L’homme n’a pas attendu la loi de 1901 régissant en France le statut associatif pour mettre en place des structures œuvrant pour le bien commun : on trouve déjà dans l’Egypte antique des organisations se rapprochant de la conception moderne d’une association. Le Moyen-Age a fait part belle à des structures associatives pour régir la vie politique et économique : monastères, corporations… L’homme a donc de tout temps eu recours aux associations pour suppléer ses activités lucratives quand celles-ci ne pouvaient pas répondre à certains besoins, par exemple défendre les intérêts d’un groupe. Plus largement, les associations participent à la cohésion sociale et sont donc indispensables à toute nation. Mais comment sont-elles utiles concrètement ? Et surtout, l’Etat ne pourrait-il pas remplir leur mission plus efficacement ? 

 

Faux-nez du service public ?

 

Georges Nurdin, économiste et essayiste, distingue les associations « normales » au fonctionnement sain, c’est-à-dire se finançant elles-mêmes, et les « substituts purs et simples du service public » qui ne vivent que grâce à la perfusion des deniers de l’Etat. Les premières ont trouvé leur équilibre naturel, autrement dit ont un public qui y voit assez d’utilité pour les financer (généralement via des cotisations mais aussi par des activités pseudos-commerciales) tandis que les secondes sont structurellement déficitaires. Outre les éventuels détournements de fonds et autres malhonnêtetés qui peuvent découler d’une telle situation, cela pose une question que Georges Nurdin résume ainsi : ou bien ces associations sont des services publics déguisés, c’est-à-dire ayant une véritable utilité sociale que l’Etat se doit de financer (selon ses objectifs bien-sûr), et alors on est en droit de se demander pourquoi l’Etat ne prend pas directement en charge ce service public, permettant alors un contrôle démocratique ouvert (via le Parlement, la publication des comptes etc). Une association de loi 1901 est en effet opaque par bien des aspects (en particulier en termes de comptabilité), ce qui rend par conséquent flou le fonctionnement et la réalité de ce service public masqué. Mais pire, lorsque le champ des activités des associations ne rentre pas dans ce que l’on pourrait qualifier de service public, les deniers de l’Etat financent alors des projets idéologiques, religieux ou partisans. 

 

0,01 % des associations

 

La position de George Nurdin est manichéenne et on pourrait lui rétorquer que les faits sont plus compliqués en réalité. L’immense majorité des associations sont utiles à la société, et lui-même précise que de nombreuses nations nous envient le statut des « associations – 1901 ». Mais son analyse a le mérite de questionner ce que presque tout le monde considère comme « bien » puisque non-lucratif. Il ne faut pas oublier que qui dit argent public dit contribuable, et l’Etat verse 42 milliards d’euros par an aux associations (chiffres de 2012). Chaque foyer fiscal donne donc généreusement l’équivalent de 2 500 € par an à des associations sans aucune transparence derrière de la part de celles-ci. Et sur les 1,3 millions d’associations enregistrées en France, 200 récupèrent les deux tiers de ces fonds. D’un côté, ceci conforte l’idée que la quasi-totalité du monde associatif a un fonctionnement sain, mais c’est alarmant lorsque l’on comprend qu’un nombre très faible de structures reçoivent des sommes colossales sans aucun contrôle (par exemple l'Association nationale de formation professionnelle des adultes (Afpa), qui a touché 226 millions d’euros en 2010). 

 

Que faire ? 

 

La question est très compliquée puisque pour y répondre il faudrait étudier minutieusement les 500 pages du jaune budgétaire, document édité tous les 2 ans par le ministère des Finances et qui recense toutes les subventions accordées par l’Etat aux associations. Si nous ne disposons pas des compétences requises pour proposer une solution, il semblerait pertinent que l’Etat soit un peu plus transparent sur le financement du monde associatif, surtout quand on sait que 42 milliards d’euros représentent plus de la moitié des 3% de déficit accordé par les statuts de l’Union Européenne (70 milliards d’euros). En ces temps de crise où le budget de l’Etat est fortement mis à contribution, c’est d’autant plus un élément à prendre en compte. Le jaune budgétaire n’est pas suffisant puisque sous couvert de transparence, il contribue à entretenir l’opacité en ne proposant aucune explication ni synthèse des sommes octroyées. Une solution pourrait être de s’inspirer de la Grande-Bretagne où depuis 2006 un Office of the Third Sector (rattaché au Premier Ministre) centralise et met en œuvre la politique associative. En s’appuyant sur le rapport annuel de la Charity Commission qui détaille et justifie chaque subvention publique. 

 

 

Alexis de La Morinerie

Responsable marketing et communication à Savoir Oser la Solidarité 

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